Par Thomas Dusseau - gironde@sudouest.fr
Publié le 10/12/2021 à 20h26
Les porteurs d'un projet consistant à aménager une piste cyclable sur l'emprise ferroviaire s'appuient sur l'expérience du maire de Créon, dans l'Entre-deux-Mers.
Et contrarient les militants favorables au train.
Deux lignes s'opposent désormais concernant le devenir de l'emprise ferroviaire de 24 km située entre Blaye et Saint-Mariens. D'un côté, celle des militants de la
réouverture de la ligne TER, soutenus par nombre d'élus locaux et régionaux. De l'autre, celle des membres de la nouvelle Association pour le développement des mobilités actives (Adéma), qui prônent la création d'une « piste cyclable verte » à la place des rails. Leur pétition a déjà recueilli pas loin de 1 400 signatures. Un soutien qui ne pèse pas lourd en face des motions et déclarations politiques. Suffisant en tout cas pour convaincre l'ex-maire de Créon Jean-Marie Darmian de s'engager sur la RDI 37 à une heure de pointe et rejoindre Saint-Girons-d'Aiguevives début décembre.
« Nous n'avons que 14 km de voie verte (de Blaye à Étauliers, NDLR) en Nord-Gironde alors qu'il y en a 650 dans le reste du département », met en avant Isabelle Boyer, la présidente de l'Adéma pour soutenir la création de cette voie verte « propice au tourisme, aux loisirs, aux sportifs, et autres activités tant pour les adultes que pour les enfants Elle permettrait aussi, selon ses défenseurs, de « raccorder les autres pistes cyclables du Médoc par le bac puis vers Bordeaux par la SNCF à Saint-Mariens Et de renforcer « l'attractivité du territoire notamment à travers le cyclo-tourisme, dans l'air du temps.
a L'ancien maire de Créon s'est déplacé à Saint-Girons-d 'Aiguevives début décembre pour raconter le combat ayant précédé la création de la piste cyclable Roger-Lapébie sur une ancienne voie ferrée située dans I 'Entre-deux-Mers.
À la clé, des retombées économiques dont peut témoigner Jean-Marie Darmian : « du chiffre d'affaires du commerce en centre-ville de Créon » est induit par les cyclistes empruntant la piste cyclable Roger-Lapébie (entre Bordeaux et Sauveterre-de-Guyenne), laquelle a été aménagée il y a plus de vingt ans en lieu et place... d'une ancienne voie ferrée.
Des risques
Pas venu pour dire « le vélo c'est bien, le train ça ne vaut rien » ou inversement, I 'ancien édile et conseiller général de Gironde a témoigné du combat mené à l'époque pour la création de cette piste cyclable, au point d'avoir été « séquestré par des chasseurs » opposés au projet. Dans un contexte différent, Où les compétences des collectivités n'étaient pas non plus les mêmes, le Conseil général de la Gironde avait racheté une partie de l'emprise ferroviaire de l'ancienne ligne Bordeaux-Eymet, désaffectée. Un « terme juridique », précise d'emblée Jean-Marie Darmian en bon pédagogue (il a été enseignant), rendant imprécis le tract de l'Adéma mentionnant que la ligne SNCF Blaye-Saint-Mariens est « désaffectée depuis dix-sept ans ».
Le trafic voyageur a été abandonné il y a plus de 80 ans et les derniers trains de marchandises ont circulé en 2004. Si la SNCF l'a depuis très peu entretenue, elle reste toujours propriétaire. « Tant qu'elle n'est pas désaffectée, elle est considérée comme utilisable pour du transport. Et quand elle est désaffectée, la SNCF peut la vendre" poursuit l'ancien maire de Créon, soulignant le danger. Le risque majeur morcellement de la vole et le rachat d'une partle des parcelles par des propriétaires privés. « À la première vente tronçonnée, c'est tout le projet qui est mort », prévient Jean-Marie Darmian.
Seul moyen de I 'éviter : « Inscrire dans nos documents d'urbanisme la sanctuarisation de cette emprise. La SNCF sera alors obligée de s'adresser aux élus », explique Célia Monseigne, maire de Saint-André-de-Cubzac et conseillère départementale, présente lors de la réunion de l'Adéma aux côtés du maire de Saint-Savin, Alain Renard.
Trains de retard
« Ce serait une catastrophe que l'espace public reparte vers le privé, d'où l'intérêt de préparer un projet alternatif, lance Jean-Marie Darmian aux défenseurs de la voie verte. Votre projet doit être préparé, monté, travaillé ». Et convaincre des acteurs politiques, économiques Ou touristiques du territoire de le porter, au-delà de I 'association Adéma qui pourrait être « le pivot d'un futur comité de pilotage » fédérant des acteurs politiques, économiques, touristiques Ou associatifs du territoire.
Les militants de la réouverture de la ligne SNCF ont plusieurs trains d'avance par rapport aux défenseurs du vélo. Ils sont cependant contrariés par ce projet de piste cyclable qui vient se greffer au débat sur le désenclavement du territoire. Paradoxalement, les deux camps militent pour des modes de déplacements écologiques.
Quels coûts ?
Selon les scénarios envisagés (desserte directe entre Blaye et Bordeaux ou correspondance à Saint-Mariens), le coût des travaux liés à la réouverture de la ligne SNCF est évalué entre 100 et 125 millions d'euros. Celui de la création d'une voie verte est estimé par ses défenseurs à environ 4 millions d'euros.
Par Thomas Dusseau - gironde@sudouest.fr
Publié le 10/12/2021 à 20h26
Mis à jour le 10/12/2021 à 20h31